samedi 28 septembre 2024

MEGALOPOLIS (DE FRANCIS FORD COPPOLA)

 Megalopolis (de Francis Ford Coppola)


Ça devait être - pour se contenter du copier-coller du compte-rendu de presque tous les journalistes - le testament de Francis Ford Coppola. Au final, c'est une énorme pièce montée composée avec tout ce qui traînait dans l'arrière-cuisine. Et forcément, à l'aspect et au goût, il y a quoi rebuter les palais les plus fins. Disons que Coppola aurait pu écrire un grand film sur l'histoire de l'Amérique, un autre sur la nature humaine, un troisième sur la manière dont le pouvoir peut corrompre les individus, voire même un quatrième sur la (dé)construction de l'utopie et ce que représente la civilisation ou simplement une communauté (l'obsession américaine pour la "city"). Au lieu de tout cela, on obtient un long métrage qui prend des allures de patchwork souvent incompréhensible. On peut certes isoler plusieurs scènes intrigantes, voire franchement réussies, apprécier le jeu des acteurs qui sont quasiment tous convaincants (Adam Driver est même excellent), adhérer à l'esthétique ultra saturée de certains plans (d'autres sont par contre tellement pompiers que ça en devient risible)… par contre, si on sort de la salle en prétendant avoir trouvé un fil conducteur dans ce long-métrage et en faire un résumé cohérent sous forme de commentaire composé, c'est une crise de mythomanie pure et simple. Petite remarque technique : moi qui apprécie les longs plans séquence et les films qui prennent le temps de se poser sur leurs personnages, je me suis pris avec le montage parfois vertigineux et épileptique une de ces migraines ophtalmiques des grands soirs. Il est aussi désolant de voir Coppola transformer son film en une mauvaise resucée de Docteur Strange dans la folie du Multivers, en insérant des délires philosophiques, politiques, mystiques et sociologiques qui ne visent qu'à épater le quidam. Apprendre le dictionnaire des citations ne fera pas non plus d'un cuistre un fin lettré. Coppola s'est-il fourvoyé ou simplement se moque-t-il de savoir s'il y a encore un public disposé à le suivre? "Tu quoque, Francis".



vendredi 6 septembre 2024

BARNIER PREMIER MINISTRE : LA VICTOIRE ET L'ILLUSION DE LA GAUCHE

 Non, la gauche n'a pas gagné les élections législatives. Et pour cause, il faut cesser de croire qu'il existe "la gauche".

La division de l'échiquier politique en partis est dépassée depuis bien longtemps. Il n'existe plus que deux camps différents. Le premier, le plus large, celui qui gouverne depuis des décennies, c'est le camp du néolibéralisme, de l'européisme. Qui considère que le marché, le profit, l'Europe telle qu'elle est structurée aujourd'hui, constituent des dogmes qui ne peuvent être contournés. On y trouve la droite classique, le prétendu centre macroniste, une bonne partie des socialistes et même l'extrême droite, qui s’est normalisée en grande partie et qui aujourd'hui propose les mêmes recettes, se révèle parfaitement compatible avec les desideratas du patronat. Ces gens-là sont assis à la même table depuis longtemps et peuvent festoyer sans être dérangés. Hollande, Sarkozy, Macron, Chirac, ce n'est pas toujours le même qui préside la table mais tout finit plus ou moins dans les mêmes estomacs. Michel Barnier prépare les plats en cuisine depuis 5 décennies. Il subsiste encore des différences entre ces gens-là mais elles sont d'ordre sociétal. Par exemple, la manière de considérer le mariage ou l'adoption pour les homosexuels, les quotas concernant l'immigration… ce sont les variables d'ajustement qui permettent de faire croire que la pièce de théâtre qu'ils représentent est crédible et ouverte à tous les possibles. Mais le final est le même chaque soir et le public continue d'applaudir. Pour filer la métaphore culinaire, ce sont toujours les mêmes plats qui mijotent, avec plus ou moins de sel ou de poivre.

En face, nous trouvons ceux qui proposent une politique de rupture, c'est-à-dire qui considèrent que le néolibéralisme amène plus de souffrance que de bénéfices à la société et que l'Europe telle qu'elle est constituée doit être profondément révisée, voire même pour les plus virulents, qu'il faut la quitter. Ces gens-là sont minoritaires dans le pays, ils sont essentiellement représentés par la France insoumise, les micro partis de l'extrême gauche, des écolos et un faible pourcentage des socialistes.


Nous en arrivons au péché originel : le NFP n'avait absolument aucune raison d'être. Il s'agissait d'une alliance incohérente destinée avant tout à combattre un ennemi commun, mais qui n'avait aucune possibilité de gouverner, même en cas de majorité absolue, car au moment de voter les grandes orientations de l'État, comment fondre en un seul élan les ambitions d'un Glucksmann ou d'un Mélenchon ? Il faut voir dans ces 50 jours sans gouvernement et la valse des possibles candidats uniquement des jeux d'intérêt personnels. Le camp d'en face a les yeux rivés sur 2027 et sur une bataille d'égos, pour savoir qui mangera les meilleurs morceaux, mais il est bien clair depuis le départ qu'au moment de répartir les places à table, ces gros gourmands trouveront très facilement un moyen de se garantir les chaises et les couverts de choix. La seule nouvelle importante finalement, c'est que le Rassemblement National fait désormais officiellement partie des convives. On sait que le repas sera interrompu par des blagues grivoises et qu'il mettra trop souvent les coudes sur la table, mais peu importe, il a désormais son rond de serviette.


Reste à écrire le final de cette histoire. Peut-on parler réellement de coup d'état ? Absolument pas. Nous pouvons dire ce que nous voulons de notre Empereur Macron Premier mais il a parfaitement intégré le délitement de la scène politique en France et la docilité de la population, et il joue crânement sa partie, d'autant plus facilement qu'on lui laisse réécrire les règles à chaque fois qu'il est sur le point de la perdre. Sortir par le haut, c'est-à-dire par les urnes, est utopique, nous venons encore de le constater. L'invention du Grand épouvantail RN permet désormais d'orienter les scrutins de manière à ce que la pièce retombe toujours du bon côté. Il ne reste qu'une seule solution pour ceux qui considèrent que la partie actuelle est délétère : un soulèvement populaire. C'est donc au peuple souverain, comme toujours dans l'histoire, que revient la décision finale. Docilité, résignation, colère, désespoir, enthousiasme, revanche, que les Français choisissent. L'heure est venue pour chacun de préparer son lit et de s’y coucher. Bonne nuit. Ou pas.



mardi 3 septembre 2024

L'ASSEMBLÉE NATIONALE EXPLIQUÉE AUX ENFANTS

 L'Assemblée nationale pour ceux qui n'ont rien compris et pour les enfants du primaire.


On ne va pas parler de partis, c'est trop compliqué pour vous, on va parler de couleurs (si vous êtes daltonien, je ne peux rien faire, malheureusement).

Monsieur Orange gouverne le pays depuis 7 ans. Il aime beaucoup les autres couleurs mais il ne tient pas compte, jamais, de leurs opinions. Et Monsieur orange est très susceptible : quand il veut faire quelque chose et que ça ne marche pas comme il l'entend, il devient tout rouge. Comme le rouge, c'est une couleur qu’il n'aime pas du tout, du coup il dissout l’assemblée, en espérant qu'elle devienne orange partout.

Oui mais voilà, Monsieur Orange est en réalité beaucoup moins futé qu'il ne veut le faire croire, et la plupart des français en ont plein le dos de ses conneries géniales.

Monsieur Orange et Monsieur Bleu, un de ses rares amis, qui a lui aussi connu des jours meilleurs, se font ratatiner et perdent à eux deux une centaine de députés. Monsieur Violet a bien failli empocher la mise, mais comme toutes les autres couleurs ont décidé de se mélanger, de s’unir contre lui, quitte à ce que ça ne ressemble plus à rien, c'est Monsieur Rouge qui a gagné, d'une très courte tête. Même si il va falloir qu'il soit très patient et ouvert d'esprit pour faire ce qu'il veut faire… et de toute façon, on sait très bien qu'il ne le fera pas… comme d'habitude, tout le monde fait semblant parce que Monsieur Rouge, il est un peu grognon et on aime bien faire croire qu'il est méchant.

Du coup, comme c'est Monsieur Orange qui possède tous les jeux de société et qui dirige la partie, il a décidé que le mieux à faire c'est de dire qu'il n'y a pas eu d'élection et que seuls les Oranges et les Bleus sont intelligents. Les autres, on les a laissés participer mais c'était pour rigoler, ils sont trop cons.

Maintenant toi qui est au cours moyen ou en sixième, ce que tu ne sais pas forcément, c'est que c'est un jeu un peu spécial : il faut que la couleur qui commande parvienne à convaincre les autres de lui laisser une chance. Sauf Monsieur Orange. Lui il s'en fout, il a une carte immunité qu'il a pioché dans le tas et dont il peut se servir jusqu'à la fin de la partie. Et à chaque fois qu'il tombe sur une case pénalité, allez tout droit en prison ou bien reculez de 3 cases, il sort sa carte et il rejoue. Du coup, tous les autres joueurs commencent à en avoir ras-le-bol et tôt ou tard, il y en a un qui va envoyer valser le plateau et ça va être le bordel.

Voilà. C’est nul, en fait, ce jeu.