dimanche 19 mai 2024

BRET EASTON ELLIS : LES ÉCLATS

 Bret Easton Ellis : Les éclats


Le dernier roman de Bret Easton Ellis est disponible au format livre de poche, ou plutôt devrions-nous dire bottin téléphonique, puisqu'il comprend environ 900 pages. Il suffit de lire les 30 premières pour comprendre que nous sommes bel et bien en terrain connu et balisé. Il y est question de substances stupéfiantes, d'alcool, de dépression et d'apathie, de name/brand-dropping et d'une jeunesse dorée qui roule en Porsche et découvre les émois des corps, notamment du point de vue de garçons qui désirent d'autres garçons. Nous sommes au début des années 1980 et il s'agit d'une vraie fausse biographie : Bret nous relate son adolescence, lorsqu'à l'âge de 17 ans, il fréquentait un des lycées huppés de la Californie pour son année de terminale (et préparait son premier roman, Moins que zéro, par la même occasion). On y découvre son cercle d'amis et au-delà de la banalité apparente des rapports qui s'établissent entre eux, on s'attache très rapidement à cette joyeuse brigade de stéréotypes souriants et bronzés. Ceci jusqu'à ce que débarque un nouvel étudiant, Robert, qui va faire basculer le roman dans une sorte de délire paranoïaque, d'enquête policière, de chronique gore. C'est que dans le même temps, plusieurs jeunes filles ont été enlevées et ont subi d'atroces tortures, avant d'être retrouvé trucidées dans des mises en scène sordides. Le trawler, un tueur en série, opère suivant un rituel dont plus ou moins tout le monde semble se ficher éperdument. Robert est clairement le suspect numéro 1 aux yeux de Bret, mais à ceux des autres, c'est un garçon doué, affable et particulièrement beau, rien de plus. La langue n'a rien de complexe, Ellis écrit comme s'il était en train de vous parler et sa chronique, parfois redondante, fini par devenir ensorcelante. Les scènes de dialogue alternent froide colère et tension glaçante, le petit cocon douillet et superficiel est lacéré et semble pourrir de chapitre en chapitre. . Une réussite complète, pour peu évidemment que l'on soit sensible au vrai faux style d'un écrivain qui divise depuis ses tous premiers écrits. Et qui continue d'extraire de la matière surprenante, de la vacuité et fatuité qui l'entourent. Le néolibéralisme et ses névroses, la cuillère en or bien enfoncée au fond du palais.



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire