J’ai de mauvaises nouvelles en provenance des cieux.
De très mauvaises nouvelles, même, venant de celui que vous appelez votre Dieu. Le plus drôle, dans cette histoire, c’est qu’il est multiple — ou qu’ils sont plusieurs. Chacun est persuadé de tenir le bon, le seul, l'unique; l'original. Mais n’est-ce pas, après tout, la plus formidable et absurde démonstration d’égocentrisme que de croire cela ? En tous les cas, il est bien étrange, votre Dieu. Son emploi du temps doit être assez creux, ses prérogatives particulièrement étriquées, s’il lui reste assez pour se préoccuper de ce que vous mangez, comment, quand, de quelle façon et quel jour. S’il passe ses journées à mesurer les centimètres carrés des tissus que vous portez, à s’ériger en police de la mode pour vous expliquer comment vous vêtir et ce qu'il faut couvrir (même en période de canicule, Dieu est farceur). Ce même Dieu qui exige de savoir si vous baisez, quand vous baisez, avec qui — et par quel trou. L'idée même de ce Dieu-là a de quoi faire débander, de toute manière. Mais plus sérieusement, vous pensez vraiment qu’il existe une entité divine qui passe ses journées à enregistrer minutieusement le moindre de vos faux pas, de vos pets ? Et qui ne rêve que d’une seule chose : vous voir anéantir le voisin, chasser l’infidèle, trucider celui qui semble différent et qui n’adresse pas les mêmes prières à la même personne, dans la même langue au même endroit ? Je ferais appel à votre bon sens… mais je sais depuis longtemps que je perds mon temps. Après tout, est-il seulement possible de raisonner avec des gens qui pensent sérieusement qu’un type a écarté la mer Rouge d’un simple geste de la main ? Qu’un autre est capable de transformer de l’eau en vin ? Qu’un troisième a promis un bon paquet de vierges au paradis à celui qui ira se faire exploser dans un marché ? Peut-on vraiment encore avoir l’audace d’espérer quoi que ce soit d’une foule d’imbéciles pour qui ces inepties sont comme gravées dans la pierre ? Ces préceptes, ces règles de conduite absolue, justifiant la pire des barbaries. Du même acabit qu'un extraterrestre venu de Krypton ou qu'un type qui s'est vu investi des pouvoirs d'une araignée après une morsure lors d'une expérience sur un campus. Crédibilité zéro. La religion — toutes les religions — existent sous différentes formes uniquement parce que les différents peuples de notre planète ont toujours, sous toutes latitudes et à toutes les époques, cherché un moyen de rationaliser la vacuité et l’âpreté de l’existence. Quelle question insondable que celle de notre présence en ce bas monde, et de notre sort demain — un souffle et nous ne sommes plus, comment envisager notre disparition dans le néant le plus complet ? L'effroi nous saisit. Et nous brodons. Nous divaguons. Nous nous rassurons. Nous nous emplissons la tête de vaines promesses, édictées et maintenues par des dieux vengeurs qui n’existent que dans notre propre délire existentiels. Et tout cela est bien pratique pour s’assurer la docilité des peuples. Pour les mener à l’abattoir sans qu’ils n’osent s'ébrouer et brailler, comme de pauvres bêtes qu'on va d'abord tondre. Pour obtenir gloire, richesse et pouvoir. Pour écraser sous le talon les masses aveugles, bercées par des textes sacrés écrits par des inconnus, traduits, recopiés, trahis par d’autres illustres inconnus, jusqu’à ne plus être qu’un fatras de fadaises — tout juste bonnes à être apprises par cœur et récitées bêtement lors de cérémonies sectaires, pendant que l'officiant se remplit les poches et la panse avec ce qu'il dérobe à ses fidèles à genoux.
Ouais, j’ai de mauvaises nouvelles en provenance des cieux : il n’y a personne qui vous regarde. Personne pour vous juger. Personne pour vous récompenser. Pas de Terre Promise pour toi, Benjamin ou Simon, pas de vierges pour Ali ni de paradis pour Marie-Catherine ou Yves-Emmanuel. Vous êtes les dindons de la farce, vous vous êtes laissés fourrer jusqu'à l'os, et en retour, vous rêvez de voir rôtir le voisin à la broche. Bande de cuistres, de pleutres, pathétiques créatures qui osent croire qu'IL vous a fait à son image. On pourrait l'espérer plus doué, quand même, votre Dieu, non ? La bête, le diable, l'impie, l'ennemi, dans cette histoire… c’est vous tous. Et vous seuls. Baisse les yeux et ne te cherche d'excuse, petit morveux.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire