mercredi 26 juin 2024

LE COMTE DE MONTE-CRISTO (de Matthieu Delaporte et Alexandre De La Patellière)

 Le Comte de Monte-Cristo (de Matthieu Delaporte et Alexandre De La Patellière)


Au diable Stan Lee et les super héros de l'empire américain; chez nous, en France, nous disposons d'un patrimoine culturel et littéraire de premier ordre, avec notamment les romans d'Alexandre Dumas et leurs nouvelles adaptations 2.0. Après le diptyque consacré aux Mousquetaires, place au Comte de Monte-Cristo, c'est-à-dire un Pierre Niney victime d'un complot et jeté aux oubliettes pendant plus d'une décennie, jusqu'à ce qu'il revienne hanter la bonne société qui l'a allègrement trahi. Ceci pour asséner une vengeance implacable, qui a ses yeux n'est rien d'autre qu'une forme de justice immanente. Entre-temps, il a fait la connaissance dans les geôles de l'Abbé Faria (Favino grimé en maître des clés de Fort Boyard), qui lui indique comment et où mettre la main sur le prodigieux trésor des Spada, lui enseigne tout un tas de choses bien utiles (des langues étrangères aux mathématiques), tout en affinant son goût pour la vengeance à venir, à base de séries de pompes (pas simple de prendre de la masse, avec la dénutrition). Après une évasion rocambolesque, le nouveau compte de Monte-Cristo, qui s'appelait autrefois Edmond Dantès, réunit d'autres victimes des horribles traitres qui l'ont injustement condamné et prépare un plan machiavélique qui n'épargne personne et cible plusieurs générations. Le Comte autoproclamé dispose désormais d'une fortune colossale et qu'un QG à faire pâlir toute la noblesse, de gadgets improbables comme des masques pour s'inventer d'autres identités provisoires : on flirte avec le synopsis d'une série Marvel Disney +. Toutes les pièces du puzzle s'assemblent et on ne peut qu'admirer ce génie du mal qui œuvre pour son bien. Les puristes des romans de Dumas devront se pincer le nez, notamment pour ce qui est de la dernière partie du film, mais il est ici surtout question d'une adaptation pour le grand écran, qui correspond aux attentes du public moderne, essentiellement préoccupé par le regard de Dantès/Monte-Cristo, de ce qui le pousse à agir, inflexible, inébranlable, inéluctable. Même Mercedes, celle qu'Edmond devait épouser avant la déchéance, ne suffit pas à ébranler ses sinistres convictions (Le Comte est un ancien naïf qui croyait que l'amour peut être éternel. C'est sooo 19° siècle, ce concept…). Ma foi, puisqu'il s'agit de cinéma et d'un produit à ranger dans la catégorie "divertissement de masse", le fait est que l'ensemble fonctionne admirablement bien et qu'il n'oublie aucun des ingrédients pour obtenir un bon gros gâteau, à partager avec le plus grand nombre. Si l'on fait exception d'une musique parfois-pompière, qui vient très lourdement surligner certains des instants les plus dramatiques, le Comte de Monte-Cristo 2024 a tout pour être le nouveau petit carton des salles obscures et détrôner la gentille comédie d'Artus. Si Les Mousquetaires ressemblaient (de loin) aux Avengers, Dantes/Frank Castle n'est pas en reste. On attend la suite de ce Multivers qui aura peut-être le mérite de pousser une génération d'illettrés à prendre une carte à la bibliothèque. Rien que pour eux, un résumé en un mot de l'action du Comte quand il croise ses adversaires : "Cheh" !



dimanche 23 juin 2024

MARIA (SCHNEIDER)

Maria (de Jessica Palud)


 Il faut avant tout revenir aux origines. Maria Schneider est une jeune fille pas encore majeure, dont les rêves sont un peu ceux de bien d'autres adolescentes de son âge. Le cinéma, la gloire, une vie aisée. Il faut dire qu'elle a un atout sérieux dans sa manche : elle est la fille naturelle de Daniel Gélin, un acteur alors très en vogue, ce qui lui ouvre fort naturellement les portes des plateaux mais aussi (et surtout) des agences qui comptent. Tout ceci explique qu'à 19 ans, sans expérience mémorable dans le milieu, elle est choisie par Bertolucci pour incarner le rôle de Jeanne, dans le Dernier tango à Paris, aux côtés de Marlon Brando (ici, Matt Dillon, en publicité vivante pour l'Actors Studio). Un film qui était à la fois un extraordinaire ascenseur social et artistique et… vers l'échafaud. Une scène va marquer tous les esprits, celle d'une relation violente et non consentie avec son partenaire à l'écran, qui utilise (le détail est devenu presque iconique) une motte de beurre pour arriver à ses fins. Nous parlons là d'une autre époque, bien avant Me-too, l'autre opposé sur le spectre de la parité. La féminolâtrie actuelle était alors inenvisageable et l'ont demandait aux actrices d'être avant tout des potiches séduisantes, au service d'histoires masculines filmées par un regard masculin. La vraie question pourrait être aussi : jusqu'où peut-on aller au nom de l'art ? Je rajouterais : n'y avait-il pas un peu de naïveté désarmante à imaginer que le tournage avec Bertolucci allait se dérouler sans heurt, avec une jeune actrice inexpérimentée choisie uniquement pour son physique et certainement pas pour son expérience ou ses capacités professionnelles ? Le désir d'être reconnu et vu est une lame à double tranchant et inexorablement, avec une lame, on finit souvent par se couper. Bref, Maria Schneider à bien des raisons d'en vouloir à ses partenaires du Tango, mais de là à nous proposer cette caricature que devient la seconde partie du film, sans la moindre nuance, c'est un peu grossier. Il a donc suffit de cette scène humiliante pour que l'actrice plonge dans les paradis artificiels, assume sa bisexualité, s'enfonce dans la dépression. Quand on est aussi fragile, ce n'est pas forcément une idée géniale que de désirer investir l'univers du septième art. Le fait est que le film de Jessica Palud correspond parfaitement à l'air du temps, à l'heure d'une chasse au masculin systémique. Un tel sujet, avec de tels protagonistes, c'est du pain béni. S'il est difficile de défendre réellement ceux qui seraient aujourd'hui probablement bannis par la profession, il est tout autant difficile de gober cette plongée dans le misérabilisme, au nom d'un drame artistique et intime qui devient dès lors le marqueur d'une carrière et d'une vie. Anamaria Vartolomei est très convaincante dans l'expression du clair obscur continu de Maria Schneider, et nullement responsable du pathos dégoulinant de la dernière demi-heure, initiée par une réalisatrice "en mission", avec Cannes et son cahier des charges dans l'objectif ?



samedi 22 juin 2024

OMNIBUS NAMOR PAR JOHN BYRNE

 


John Byrne est canadien, il a la réputation de pouvoir écrire et/ou dessiner des centaines de pages par trimestre. Il n'a pas son pareil pour incarner le Marvel Style des années 1980 et tout ce qu'il touche finir briller de mille feux (Fantastic Four, Alpha Flight, X-Men...). Mais Namor, ce n'est pas de la tarte ! Le héros se prête facilement au persiflage : nous avons face à nous un souverain soupe au laid aux grandes oreilles, toujours prêt à péter un câble à la moindre contrariété, qui passe le plus clair de son temps à déambuler dans un maillot de bain moulant et qui doit, forcément, dégager une certaine odeur de poissonnerie, ce qui n'est jamais un atout pour les relations sociales. Rendre Namor glamour, mission improbable ? Demandez donc à John Byrne, il vous répondra qu'à l'impossible, nul n'est tenu. 



En 1990, il décide de proposer sa version du Sub-Mariner, revue et corrigée pour le public de la fin du siècle. Exit le super-héros incompris et rageur, place à un mutant enfin libéré de ses angoisses, plus posé, qui se lance dans le monde de la haute finance pour protéger efficacement les mers dont il est le gardien écologiste implacable. Scénario et dessins, on n'est jamais aussi bien servi que par soi même, surtout lorsqu'on a du talent. Première mesure, expliquer les sautes d'humeur d'un Namor irritable. Pour ce faire, notre héros rencontre dès les premières pages Cab Alexander, un vieux scientifique amateur, et sa fille, dont il va par la suite tomber amoureux. Cab lui explique avoir deviné la source du problème : un déséquilibre sanguin occasionné par le trop plein, ou la carence en oxygène, consécutive à la dualité terrestre/amphibienne du Prince des mers. Dès lors, Namor décide de profiter de sa nouvelle stabilité caractérielle pour investir la finance, via une compagnie écran, la Oracle Incorporated. C'est en puisant dans les innombrables trésors qui jonchent les reliefs marins qu'il va lever des fonds et lancer sa nouvelle croisade. Qui va lui valoir de perfides nouveaux ennemis, comme les jumeaux Marrs, rivaux à la bourse. Ce qui ne l'empêchera pas de tomber amoureux de la sœurette, à elle seule sorte de gravure de mode ultime du monde de Wall Street d'il y a trente ans. Vous l'avez forcément deviné, notre héros du jour est un chaud lapin. Byrne met ensuite le mutant aux prises avec le Griffon (qu'il dompte aisément) et une créature engendrée par la pollution ambiante, un certain Slug, et lui fait éviter une catastrophe écologique provoquée par des fanatiques de l'environnement. Le Namor de notre omnibus est certes un homme d'affaires, il comprend parfaitement les rouages de Wall Street et il réussit très rapidement à se faire une place parmi les noms qui comptent, parmi les capitaines d'industrie craints et respectés. Mais c'est aussi un écologiste convaincu : il sait le drame de la pollution de notre planète, notamment des océans, dont il est après tout le souverain, et une de ses ambitions évidentes est de ramener un peu d'équité et de propreté dans le débat. Nous pouvons ainsi dans le 6e épisode voir la jeune cousine Namorita prise au piège du cauchemar écologique qu'est Slug, tandis que dans le même temps les jumeaux Marrs acquièrent une importance capitale dans la première partie de l'omnibus, car ils représentent la version diabolique du monde des affaires, des gens sans aucun scrupule et qui ont même d'ailleurs un rapport assez ambigu entre eux. Certes, Phoebe met peu à peu mais de l'eau dans son vin, tandis que le frère, lui, semble être une pourriture que rien ne peut racheter. Namor va aussi croiser la route du Griffon (qu'il va dompter et utiliser comme un coursier ailé) et de Headhunter, la chasseuse de têtes qui permet d'écrire un épisode assez étrange où le lecteur est induit (à tort) à penser que Namor a perdu la sienne ! Un Namor qui perd vraiment ses jolies petites ailes aux pieds, et donc sa faculté de voler, suite à l'exposition à l'agent viral qui a permis de le sortir d'affaire contre la créature composée de déchets, dont nous vous avons déjà parlé. Suivront les créatures végétales de K'un Lun (les H'yltris) et le retour sur scène de Iron Fist, que tout le monde croyait mort. Une visite en Allemagne, à peine réunifiée, pour un mano a mano contre les restes du troisième Reich, guidés par Master Man, le super soldat vert de gris. Le tout avec brio, humour, un sens certain de la narration fluide, et des dessins lumineux et toujours d'une lisibilité appréciable. Byrne restera 25 numéros durant, avant de céder le flambeau à un artiste alors quasi inconnu. Mais qui ne va pas le rester longtemps…


Difficile de faire mieux, en arrivant derrière. On avait atteint un véritable pic de qualité qui faisait craindre le pire pour le successeur. Sauf que ce dernier, à la surprise générale, releva le défi avec brio. Place donc à Jae Lee, un coréen d'origine de dix neuf ans à l'époque, avec à son actif une simple pige chez Marvel, pour la revue anthologique Marvel Comics Presents. Mais quand on a du talent, on peut compenser aisément le manque d'expérience. Le Namor de Jae Lee est radicalement différent de celui de Byrne, il n'essaie pas de singer ou de rendre hommage à son aîné, mais bien d'imposer une nouvelle direction artistique au titre, en le gratifiant de pages ultra expressionnistes, sombres et paroxystiques. Le Prince des mers y apparait massif, doté d'un physique dopé aux anabolisants et noueux, une force sauvage de la nature aux veines saillantes. Les différents personnages n'ont de cesse de se lover dans l'ombre et en sortir brièvement, alors que les cases implosent, saignent, fondent ou se mêlent. Le classicisme de Byrne est foulé aux pieds par un vent de modernité, une déferlante technique impressionnante, qui va redynamiser un comic book plutôt gâté par le sort, avec de tels artistes à sa tête. Pour le scénario, Byrne prolonge quelques mois, le temps de dénouer les fils de l'intrigue précédente : Namor est devenu amnésique, privé de ses souvenirs (il ignore même son identité) par Maître Khan, et il erre dans le midwest américain ou il prête main forte à des activistes écologistes, avant de tomber nez à nez avec Fatalis himself, à bord d'un chalutier de nouvelle génération, qui menace de porter atteinte à la faune marine. C'est ensuite Bob Harras qui prend la relève dans l'écriture, le temps de ramener le Prince des mers à Altantis, où une lourde menace pèse sur son peuple, celle de légendes et de mythes oubliés et craints, qui reviennent à la vie pour détruire le royaume fabuleux. 
Le Namor de Jae Lee constitue une rupture totale par rapport à ce qui a été fait avant, du point de vue de l'approche graphique et risque d'en étonner certains. Je suis même d'opinion que c'est lorsque ce dessinateur est arrivé sur la série qu'elle a atteint son plein potentiel. Byrne a toujours été un dessinateur très compétent, très régulier, avec une souplesse de trait admirable, mais ce qu'a produit Lee dépasse l'entendement. Il suffit de se replonger dans les souvenirs en temps réel, à la découverte des premières planches, dans les pages de Strange : un véritable choc, non seulement artistique, mais philosophique, avec une question essentielle, est-ce que j'aime ou je n'aime pas ce que je suis en train de voir ? C'était véritablement ça l'interrogation, la première fois, avec ces planches expressionnistes, truffées de personnages dont les veines saillantes parcourent des corps anguleux. La couleur, qui est tout à coup disparaît, avec des cases qui ressemblent à des tableaux du Caravage, exposés par un soir d'orage… Bref, ce sont ces épisodes-là qui sont à mon sens les véritables pépites de l'omnibus et qui méritent d'être conservés à jamais. Omnibus que vous devez lire !




jeudi 20 juin 2024

LES GUETTEURS / THE WATCHERS (De Ishana Shyamalan)

 Les guetteurs / The watchers (de Ishana Shyamalan)


Lorsqu'un joueur parvient à accéder à la première division sans passer par le centre de formation ou les étages inférieurs, nous sommes en droit de nous poser des questions ou d'attendre la manifestation d'un talent fulgurant. C'est valable aussi pour la politique, le cinéma… Ishana Shyamalan, c'est-à-dire la fille de "M Night Shyamalan", ne démontre, dans son premier film tourné à l'âge de 21 ans et financé/produit par Papounet, aucune compétence particulière permettant de crier au génie. Pourtant, le pitch est assez passionnant. Il s'agit de l'adaptation d'un roman de A.M. Shine, l'histoire de créatures mystérieuses qui retiennent captif dans la forêt un groupe de 4 personnes, et les observe avec une curiosité malsaine et terrifiante, dès la tombée de la nuit, jusqu'à l'aube. Impossible pour Mila (et les autres victimes) de s'enfuir, de leur fausser compagnie, sous peine d'être rattrapée et probablement dévorée dans la forêt, ou de subir la colère des "guetteurs" au coucher du soleil. Le climat est bien entendu étouffant et l'enjeu majeur, à savoir comment parvenir à s'échapper et quitter la forêt, et étoffé par toute une série de fausses pistes et de faux semblants, qui amènent le spectateur à s'interroger sur la dynamique des relations entre les "prisonniers". Le problème, c'est que pour qu'un film de ce type fonctionne, il faut que la résolution de l'intrigue, le grand final, soit à la hauteur du reste. Et malheureusement, c'est loin d'être le cas : le dernier quart d'heure lorgne même ouvertement du côté du ridicule, avec un pathos hors de propos et l'irruption de bons sentiments et d'un discours mielleux sur la condition humaine, qui vient mettre à mal un danger surnaturel et jusqu'alors inébranlable. On sort du film en ayant l'impression que cet épilogue nous prend vraiment pour des pigeons. Il y a globalement tout un tas de bonnes idées dans ces Guetteurs, mais la plupart du temps elles ne sont que survolées, rarement approfondies, ou même carrément humiliées par des choix douteux, de l'horreur farce et attrapes et/ou burlesque (sans négliger des effets sonores pompiers. Si vous voulez entendre un vol d'oiseaux qui ressemble étrangement au vrombissement d'hélicoptères…). La jeune réalisatrice n'invente rien, recycle, recopie. N'oubliez pas, lorsque vous déposerez votre prochain CV à votre futur patron, d'ajouter une catégorie "arbre généalogique" bien en vue, de manière à multiplier vos chances. Les guetteurs est un exemple parfait de ce que nous insinuons et à l'évidence, même s'il y a probablement un vrai talent en devenir derrière la caméra, il reste encore énormément de travail à la fille de son père pour nous donner envie d'y croire.



dimanche 16 juin 2024

LA PETITE VADROUILLE (De Bruno Podalydes)

 La petite vadrouille (de Bruno Podalydès)


Le titre n'est pas trompeur. Petite, car il n'y a pas véritablement d'ambition cinématographique particulière dans le dernier film de Bruno Podalydès. Vadrouille, car cette balade amène en péniche n'a rien d'une aventure au rythme frénétique. Il s'agit juste de l'imagination débridée d'un groupe d'amis un peu à la ramasse, qui tentent de récupérer quelques milliers d'euros aux dépens d'un riche industriel, qui souhaite lui absolument passer un weekend insolite et romantique en compagnie de celle qu'il voudrait séduire et amener dans son lit. Le problème est que l'heureuse élue n'est autre que Sandrine Kiberlain, une de ses collaboratrices, qui ignore totalement que la demande de mettre au point ce projet fantasque la concerne au premier chef. Elle le découvre au moment d'embarquer et elle qui est au centre de toute cette arnaque en goguette va donc devoir donner le change, échapper aux avances empressées du patron, sous les yeux de son mari qui ne goûte guère l'expérience. Bref, tel est pris qui croyait prendre. C'est une espèce de vaudeville fluvial où les armoires sont remplacées par des écluses, où aux portes qui claquent se substituent des déjeuners sur l'herbe et des animations bucoliques. Soyons honnête, il manque tout de même quelque chose à ce film, à savoir le rythme, un vrai esprit irrésistible, un grand courant d'air salutaire (le comble alors qu'on traverse la pleine campagne). Nous sommes en permanence dans une sorte de cabotinage basique, avec un Daniel Auteuil totalement suranné. Le dernier quart d'heure est même assez malaisant, tant il semble sortir droit d'une autre décennie, d'un autre siècle. Du cinéma de (grand) papa, qu'on déconseillera à ceux qui ont vite les paupières lourdes.




lundi 10 juin 2024

LE SURSAUT REPUBLICAIN ET LES PYROMANES

 En France les différents partis de gauche ne parviennent à s'entendre que lorsque l'épouvantail du rassemblement national est agité. En règle générale, ils n'ont rien à proposer en commun, se détestent cordialement, n'ont pour seul objectif que de récupérer les enveloppes bien garnies qui reviennent aux députés, ou entretenir une grande tradition familiale ou clanique.

Et ce matin, ça recommence. Glucksmann, le macron à l'aspartame avec le charisme d'un cabillaud pêché il y a 6 jours, Roussel traitre à tout ce qu'il y a à trahir, Rousseau et ses lourds problèmes psychiatriques, la LFI qui considère que le principal problème du peuple français aujourd'hui, c'est la reconnaissance de la Palestine.

Alors, non. Tous les électeurs du rassemblement national ne sont pas des fascistes. Ce serait plutôt le cas de Reconquête, aujourd'hui. Le RN, c'est surtout un chalutier qui ramène dans ses filets ceux qui ne voient plus aucune solution, ceux qui ont réalisé avec amertume qu'aucun responsable politique ne semble se soucier de la chose publique. Ce sont aussi les plus pauvres, ceux à qui en général les mieux lotis demandent de partager le gâteau, mais qui n'ont déjà plus grand-chose eux-mêmes à partager. C'est aussi souvent ceux dont la capacité de compréhension des enjeux se limite à la parole sacrée de BFM ou cnews.

Macron, lui, s'est contenté de jouer avec tout ça, comme un gamin inconscient avec des allumettes et de l'essence.

Je reste persuadé que nous allons assister dans les prochaines semaines au "traditionnel sursaut populaire et Républicain" et que les résultats des Législatives ne seront pas aussi dramatiques qu'on le pense ce matin (n'oubliez pas que le vrai vainqueur reste encore le parti de l'abstention).

Par contre, ce qui est dramatique, véritablement, c'est l'état de notre société, du concept même de la chose publique. Du délitement total des institutions. Et même si ces législatives ne se passeront pas si mal, j'en suis convaincu, même si ce sera pas cette fois-ci, la France va se prendre le mur de plein fouet, inéluctablement, à court/moyen terme.