mardi 19 novembre 2024

PRIMAL SCREAM : COME AHEAD

 Primal Scream : Come ahead 


Aujourd'hui, parlons du grand retour de Primal Scream, l'un des groupes les plus versatiles et protéiformes de l'histoire du rock indépendant. Leur leader charismatique, Bobby Gillespie, possède un talent unique : celui de faire passer Keith Richards pour un végan abstinent. Soyons honnêtes, au vu du rythme et de la variété des substances consommées par Gillespie, le son, le style et le groove de chaque album ont toujours suivi le mouvement. Entre cocaïne (Give out but don't give up), LSD (Screamadelica) et les drogues de synthèse les plus extrêmes (Xtrmntr), chaque disque semblait être une carte postale chimique de l'état d'esprit du moment. Cependant, en écoutant leur nouvel album, un parfum différent émerge. L'amour qui imprègne chaque note laisse penser que Bobby a retrouvé une certaine douceur, peut-être grâce à une vieille connaissance : la marijuana. Ce bon vieux joint qui vous fait voir la vie en rose... et parfois des éléphants, aussi. Ce nouvel album marque une première pour Primal Scream : il est réalisé sans Martin Duffy, tragiquement décédé en 2022. Une perte qui a suscité controverses et interrogations, laissant planer une ombre sur l’avenir d'un groupe qui semblait avoir déjà dit l'essentiel. Pourtant, les faits sont indubitables : Primal Scream reste debout, vivant, remuant. Dès les premières notes du sautillant Ready To Go Home, qui mêle habilement psychédélisme et funk, ou dans les envolées orchestrales de Heal Yourself, le groupe prouve qu’il sait encore innover tout en restant ancré dans ses racines. L’engagement politique de Gillespie est au cœur de morceaux comme Love Insurrection, avec des slogans qui fleurent bons les tongs, voire le beurre d'orteil, comme "L'animo umano non sarà mai sconfitto / Viva l’amore / No pasaràn ", portés par la voix puissante d’Anna Caragnano. Qui retentit également sur Innocent Money, où elle récite des passages de Marx avec un cynisme désabusé, sur une toile sonore acide et psychédélique. Le groupe explore aussi des territoires plus introspectifs avec le blues nostalgique de Melancholy Man, sublimé par un solo de guitare remarquable (ce morceau est d'une rare beauté) , ou encore le fascinant Love Ain’t Enough, où cordes, gospel et psychédélisme s’entrelacent avec brio. L’énergie débordante de Circus Of Life ajoute une touche supplémentaire à l'ensemble, bien moins monocorde et inoffensif qu'on pouvait le croire en l'abordant. False Flags mérite aussi une mention spéciale : huit minutes oniriques et antimilitaristes qui captivent l’auditeur avant une conclusion percutante, Deep Dark Waters, un avertissement lucide inspiré des écrits de Franco Bifo Berardi. Settler’s Blues clôture l’album sur une note hypnotique et énervée, en mêlant histoire, politique et activisme, pour dénoncer les horreurs de la guerre et du colonialisme. Gillespie sait pourtant bien qu'il ne sauvera ni le monde, ni probablement personne avec Primal Scream, mais tout l'intérêt de ce nouveau disque est ailleurs, perché dans sa recherche du beau, d'un idéal clairement fantasmé, mais qui contraste si bien avec le cynisme ambient qu'on ne pourra rien lui reprocher. Et en plus, il est fichtrement bon ! 



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